mardi 17 avril 2018

Domptail (Vosges), 17 avril 1918 – Jean à sa mère

17/4/18

Ma chère Maman

Hier j’ai eu une agreable surprise ; j’etais en train de faire une partie de bridge avec les deux docteurs et un camarade lorsque Lucien [Benoît, cousin germain de Jean] est arrivé. Je ne m’attendais pas du tout à sa visite, j’avais tout à fait oublié le numero et son armée, et je n’avais pas l’idée qu’il puisse être par ici.

Il avait pretexté une tournée pour pouvoir venir me voir, car il ne lui est pas facile de quitter son bureau. Je l’ai donc accompagné dans sa tournée en auto ce qui m’a procuré le plaisir de voir du pays et surtout de passer quelques bonnes heures avec lui. Il m’a donné quelques tuyaux sur le secteur que nous allons prendre, un excellent secteur.

A l’aller, nous sommes allés voir Gilbert [Leenhardt], très ouvert et affectueux, au retour Hervé [Leenhardt], toujours moins expensif, ça a frappé Lucien comme ça m’avait frappé. Lucien a pu me denicher parcequ’il avait rencontré le colonel [Adrien] Perret à l’Armée il y a quelques jours. Nous nous sommes promis de nous revoir le plus souvent possible. Nous avons ainsi passé presque toute une après-midi ensemble.

Le matin il y avait eu revue et remise de décoration. Il faisait malheureusement un temps lamentable et la pluie et la boue terniraient le plus beau defilé.

JMO du 132ème R.I. - 16 avril 1918

Aujourd’hui je commande la Cie, [Marcel] Simonin étant parti en reconnaissance de secteur.

JMO du 132ème R.I. - 17 avril 1918

Nous avons reçu les bleux de la classe 18. Ils ont generalement assez bonne mine. J’ai une petite section qui m’a l’air de devoir pas trop mal marcher.

J’ai reçu aujourd’hui une carte de Léo Viguier qui me dit avoir dû quitter Paris pour l’Aveyron, absolument à bout de force. Elle doit être vraiment malade puisqu’elle me dit : « Je suis dans un tel état de fatigue que je me demande si je reprendrai jamais la vie normale. »

Reçu aussi une bonne lettre de Mme Scheurer. Le petit coin de vallée est retourné au calme.

Bien tendrement à vous
Jean