lundi 22 février 2016

Front de Champagne, tranchée, 22 février 1916 – Jean à sa mère

22-2-16
            Maman chérie 

            Toujours la même vie assez calme, très supportable. Chasse aux avions ds un ciel très pur. Au debut de la nuit le gibier était plus gros ; un énorme zepellin ronflait au dessus de nos lignes. Il n’a pas traversé. Debauche de projections, de fusées, de petards. Le 14 Juillet quoi ! Ce matin un manteau de neige rendait encore plus blanc le pays. Tout ça est bien different des spectacles ordinaires, des concerts ordinaires, de la vie ordinaire qu’on ne se croit plus ds le réel. C’est rudement interessant d’ailleurs ; on vit double.
            J’ai reçu hier en même temps tes chers messages des 13, 14 et 16. C’est chic de reprendre contact. Ça me manquait bien. Je ne te parle que de moi, mais je pense surtout à vous. Inutile de te donner l’adresse de [Roger de] La Morinerie, il n’est pas ds mon bataillon, et à la tranchée je ne le vois jamais, je ne vois que mes sergents et mes hommes.
Tendrement

Jean