samedi 14 novembre 2015

Plélo, 14 novembre 1915 – Jean à sa mère

Plélo, 14 novembre 1915
            Maman cherie 

            Je t’abandonne un peu. Je ne veux pas que cette journée de Dimanche se passe sans une lettre à toi. Elle a été bien remplie, Jean Lichtenstein étant venu me voir. Il n’est pas aussi bien au pt de vu sante, que ce qu’on te l’a dit à Cette.
            [Yves] Delage, le prof. de l’institut, qui dirige la station de Roscoff l’a ausculté. Il a le sommet du poumon très congestionné. Il n’a pas le courage de recommencer une année à Roscoff ds la solitude. Il va donc revenir ds le Midi. Je l’en ai felicité car cette absolu isolement n’est bon ni pour sa santé ni pour son moral. Il ne se soigne pas et souffre beaucoup. Pour moi je le regrette, naturellement, et je compte aller à Roscoff Dimanche prochain le dernier qu’il passe en Bretagne.
            Ici nous avons passé une bonne journée, malgrès le mauvais temps. Je l’ai ceuilli à la gare de Châtelaudren. A Châtelaudren nous avons visité ensemble une vieille église très curieuse et longé un vieil étang très melancolique. A Plélo, pendant que ma propriétaire nous préparait un repas frugal ns sommes allés ns promener jusqu’à ce vieux château abandonné à travers les bois, entouré de fossés, très triste. Après déjeuner nous avons bavardé longuement près d’un bon feu de bois, en oubliant presque l’heure du départ. Ce soir je t’écris de chez ma proprio. qui ne veut pas que je reste au froid dans ma chambre.

"Quatre sous-off à Plélo"
Photo légendée par Jean Médard, debout à droite
           T’ai-je raconté la soirée que j’ai passée avec quelques ss-lieutenants de la garnison, pour le depart de l’un d’eux Bastien, sur le front. Un très brave garçon ; un peu gosse mais enthousiaste. Les autres assez insignifiants, tous anciens sous-officiers. On a bu force bouteilles, champagnes, et chanté force chansons plus ou moins propres.
            Demain 2ème piqure anti-thyphoïdique ; j’espère que ça se passera mieux que la dernière fois.
            J’ai reçu ton paquet. Merci, merci beaucoup. Tout a été reçu avec joie. Ns avons dit un mot au saucisson avec Jean. Malheureusement le thé s’était rependu, j’ai pu le ramasser il n’a pas perdu son arum.
Bien tendrement à vous tous 

Jean